Eveil par l’oubli
Avec l’âge, l’oubli s’installe.
On a de plus en plus de mal à trouver ses mots. Cela arrive aussi par émotion ou “par hasard”. Mais dans tous les cas, quand le mot ou le nom tardent, il y a dans cet intervalle de vide une opportunité de reconnaître cette présence nue qui est toujours présente, mais qui semble d’ordinaire recouverte par les distractions.“Si, par hasard,
tu oublies ce que tu voulais
ou ce dont tu parlais,
tu seras libre
au moment où tu t’en souviendras.” (Bodhodayamanjarî, Bouquet pour l’éveil, 29)
_________________________
C’est comme renaître. Ou comme attendre sur un quai de gare. C’est un de ces contre-pieds où le regard peut se renouveler. C’est comme un asticot qui, voulant passer d’un brin d’herbe à un autre, doit s’étendre, se dé-contracter. C’est cela s’éveiller : reconnaître la paix bienheureuse tant recherchée dans ce silence entre le mot où je cherche à me souvenir, et le moment où le souvenir enfin surgit. L’intervalle entre deux pensées, deux mouvements.
Il y a aussi une joie spéciale au moment où, enfin, l’on se souvient, au moment où l’on reconnaît, où le train arrive. Avant qu’un nouveau bavardage ne vienne recouvrir cette joie, elle est comme dépouillée, elle n’est pas joie pour ceci ou pour cela, mais joie simple, pure expansion dans le silence, surprise devant cette expansion, étonnement d’être, pure intuition d’être.
Sur ce modèle, chacun pourra découvrir en sa vie mille occasion de s’éveiller. Ainsi, on pourra reconnaître directement notre essence divine, puis continuer ainsi, à l’infini.
https://shivaisme-cachemire.blogspot.com/2021/05/eveil-par-loubli.html