La symbolique du cercle

La symbolique du cercle

Le cercle est la seule figure géométrique grâce à laquelle, lorsque nous sommes tous placés sur sa circonférence, nous nous trouvons tous à équidistance du centre, du feu sacré. C’est pourquoi de nombreuses traditions se rassemblent en cercle pour tenir leurs assemblées et accomplir leurs rituels. Le Monde du Milieu offre sans cesse à notre réflexion et à notre imaginaire cette vision du cercle parfait : le disque du soleil, la roue de la pleine lune, la rondeur des planètes, le cœur des fleurs, la circonférence de certains lacs, etc. C’est pourquoi l’homme s’efforce de reproduire cette forme magique pour en bénéficier au mieux : les huttes, les igloos, les tipis puisent dans le cercle l’efficacité de leur bâti et les tambours font résonner le macrocosme infini.

La voûte du ciel repose sur les quartiers de la terre que soutiennent parfois quatre rois, quatre nains, quatre géants ou quatre tortues en forme de cariatides. D’où l’importance que la tradition attachait à la solution du problème mathématique de la quadrature du cercle : il renferme le secret de la transformation des formes célestes en formes terrestres. Le foyer dans la maison, l’autel dans le temple, c’est le moyeu de la roue de la terre, la matrice de la Mère Universelle ; le feu en est le feu vital. Et l’ouverture au faîte de la demeure – de même que la coupole du dôme, son pinacle ou son lanternon – est le moyeu de la roue du ciel, son point médian : c’est la porte du soleil que franchissent les âmes lorsqu’elles quittent le monde temporel pour retourner à l’éternité, comme le fait le parfum des offrandes brûlées au feu vital lorsqu’il s’élève porté sur l’axe d’une fumée ascendante, du moyeu de la roue terrestre vers le moyeu de la roue du ciel. »

Dans son Commentaire sur le Mystère de la Fleur d’Or (Édition originale 1971 ; traduction française : Éditions Albin Michel, 1979), Carl Gustav Jung propose sa vision du mandala :

Mandala signifie cercle, et spécialement cercle magique. Les mandalas ne sont pas seulement répandus à travers tout l’orient, mais ils sont en outre abondamment représentés chez nous dans des œuvres médiévales. Ce sont en particulier des mandalas chrétiens qu’il faut attribuer au haut Moyen Âge. La plupart représente le Christ au centre avec les quatre évangélistes ou leurs symboles aux points cardinaux. Cette conception doit être très ancienne, puisque en Égypte Horus et ses quatre files est en relation très étroite avec le Christ et les quatre évangélistes). A une époque plus tardive on trouve un mandala explicite et très intéressant dans le livre de Jacob Boehme sur l’âme. Il est tout à fait évident qu’il s’agit là d’un système psychocosmique fortement teinté de christianisme. Il est dénommé l’ « œil philosophique » ou le « miroir de la sages », ce qui signifie manifestement une somme de savoir secret. On rencontre la plupart du temps une forme de fleur, de croix ou de roue avec une prédilection marquée pour le nombre quatre (qui rappelle la tétraktys pythagoricienne, le nombre fondamental). De tels mandalas se trouvent également dans les dessins de sable réalisés à des fins religieuse chez les Pueblos. Mais c’est naturellement l’Orient qui possède les plus beaux mandalas, en particulier dans le bouddhisme tibétain. J’ai également rencontré des dessins en forme de mandala chez des malades mentaux, et cela chez des gens qui n’ont sûrement pas la moindre idée de telles connexions.

J’ai observé chez mes patients des femmes qui ne dessinaient pas les mandalas, mais les dansaient. L’Inde possède un terme pour cela : mandalanritya, danse du mandala. Les figures de la danse traduisent le même sens que les dessins. Les patients eux-mêmes ne peuvent pas dire grand-chose de la signification des symboles en forme de mandala qu’ils produisent. Ils sont simplement fascinés par eux et les trouvent expressifsetopérantsdans un rapport quelconque avec leur état psychique subjectif.

[…]

Lorsque mes patients produisent de telles images, il est évident que cela ne provient pas d’une suggestion, car elles furent créées bien avant que j’aie connu leur signification ou leur relation avec les pratiques de l’Orient qui m’étaient alors totalement étrangères. Elles naissaient d’une façon toute spontanée et d’une double source : la première de ces sources est l’inconscient qui engendre spontanément de tels phantasmes ; la seconde est la vie qui, lorsqu’elle est vécue dans une attitude de complet don de l’être, procure le pressentiment du Soi, de la nature individuelle. La perfection de cette dernière réalité est exprimée dans le dessin, tandis que l’inconscient oblige l’individu à se donner totalement à la vie. En effet le mandala n’est pas seulement expressif mais également opérant, d’une manière qui s’accorde pleinement avec la conception chinoise. Il réagit sur son auteur. Il renferme une vertu magique immémoriale, car il provient à l’origine du « cercle protecteur », du « cercle enchanté » dont la magie s’est conservée dans d’innombrables coutumes populaires. L’image a pour but affirmé de tracer un sulcusprimigenius, un sillon magique autour du centre, du temple ou du temenos (enceinte sacrée) de la personnalité intime, afin d’empêcher les « fuites » ou de préserver de façon apotropéique des déviations causées par l’extérieur. Les contenus magiques ne sont pas autre chose que des projections d’événements psychiques qui sont ici appliquées inversement à l’âme comme une sorte d’incantation opérée sur la personnalité ; en d’autres termes, des actions concrètes favorisent et permettent le retour de l’attention, ou mieux de la participation à un cercle sacré intérieur qui est l’origine et le terme de l’âme et contient cette unité de vie et de la conscience autrefois possédée, puis perdue et qu’il faut retrouver.

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